Messe du 28ème dimanche ordinaire

 

Abbé Giovanni Fognini, à l’église St-Martin, Onex, GE, le 14 octobre 2001
Lectures bibliques : 2 Rois 5, 14-17; 2 Timothée 2, 8-13; Luc 17, 11-19

 
Tout est mouvement dans cette page d’évangile : il suffit de relire les verbes employés par Luc : Jésus marche, traverse, entre. Les lépreux viennent à la rencontre, vont se montrer, sont purifiés en cours de route. Le samaritain revient et Jésus lui dit « Va »

Oui, tout est mouvement ! Comme dans chacune de nos vies lorsque l’épreuve nous rejoint : tout bouge, tout est chamboulé et les événements nous provoquent à un acte de foi, toujours à renouveler.

Tout est aussi opposition dans cette page d’évangile. Voici quelques exemples :

Il y a les juifs et Jérusalem-la-pure, d’un côté, et les autres, les étrangers
ceux de Samarie et de la Galilée, de l’autre côté
Il y a les prêtres de l’ancienne alliance et, en face d’eux, Jésus
Il y a 10 lépreux guéris et, en opposition, un seul sauvé
Il y a l’homme qui se jette à terre et Jésus qui le relève

J’aimerais garder et développer surtout une opposition qui structure tout le récit – et que nous trouvons aussi dans nos vies – : l’opposition entre la distance et la proximité.

Les lépreux restent à bonne distance de Jésus : la loi le veut ainsi. Pas le droit de s’approcher des lieux habités, ni de fréquenter d’autres personnes. Il n’y a pas de contact entre eux et Jésus. Seule la parole franchit cette distance. Et Jésus ne fait aucun geste, il ne les guérit pas sur-le-champ. Il les invite à aller se montrer aux prêtres chargés, selon la loi, de constater les guérisons.
Les lépreux font confiance à la parole de Jésus et, en cours de route, se retrouvent guéris. La parole du Christ s’est montrée efficace.

Ce cheminement des lépreux nous le vivons aussi et nous en faisons l’expérience dans toutes nos lèpres d’aujourd’hui qui continuent de ronger l’humanité : maladies, séparations, isolement, enfants, femmes et hommes qui ne sont pas respectés dans leur dignité. Dans ces moments-là, nous aussi nous faisons l’expérience de la distance. Parfois jusqu’à douter de la présence de Dieu. Dans ces moments-là, nous sommes invités à faire confiance en sa Parole.

Mais cette foi-confiance nous met-elle vraiment en route, en mouvement ? Ou bien s’arrête-t-elle lorsqu’elle a obtenu une réponse satisfaisante ? L’évangile vient nous rappeler que, trop souvent encore, nous « utilisons » le Christ comme instrument de notre guérison sans aller jusqu’au terme de la foi !

Le samaritain, lui, nous montre l’autre pôle de l’opposition : face à la distance, il y a la proximité.
Il vient se jeter aux pieds de Jésus, le glorifie et lui rend grâce. Et cette attitude de foi non seulement le guérit, mais le sauve. Il retrouve toute sa dignité, non seulement physiquement, mais celle de l’homme réintégré dans la communion, avec les autres et avec Dieu. Il est un homme nouveau, relevé, littéralement traduit, ressuscité.

Il fait l’expérience de la proximité de Dieu, d’un Dieu qui veut, en Jésus-Christ, que tout homme soit debout, vivant.
Sa foi l’a amené non seulement à la santé, mais déjà à la vraie vie, à la vie divine, dans une étroite proximité avec le Dieu qu’il sait reconnaître en la personne de l’homme-Jésus qui l’a relevé.

La foi le conduit à une relation vivante avec le Christ ; il reconnaît en lui la source de son salut. Et de cette foi-relation naît la louange, l’action de grâce. Il rend grâce à Dieu ; littéralement, il rend à Dieu la grâce reçue, la grâce de se savoir aimé, respecté, reconnu. Ainsi, il entre dans une relation de gratuité, de grâce reçue et donnée, et dont il fait l’expérience.

Ce samaritain nous montre quel est le terme de la foi : entrer – quelles que soient nos lèpres – dans une relation de grâce avec Dieu qui, toujours gratuitement, nous offre son salut, son Amour ; d’un Dieu proche de l’Homme, intéressé par l’Homme et par toute sa vie et qui veut rétablir chacun dans toute sa dignité ; d’un Dieu respectueux de nos libertés, de nos tâtonnements de foi ; d’un Dieu qui, dans chaque événement de ma vie, viens me redire : « Va ! Je te relève, gratuitement, par amour »

Dimanche dernier, l’évangile nous relatait la question des apôtres qui disaient au Christ : « Augmente en nous la foi ! ». Et lui de nous répondre : « Ah ! si tu avais la foi grande comme un grain de moutarde, tu ferais l’impossible ». L’évangile d’aujourd’hui nous montre le chemin à suivre pour grandir dans la foi, au cœur même des épreuves.

Oui, nous sommes invités à sortir du « donnant-donnant » avec Dieu, à croire qu’il nous doit quelque chose pour entrer, comme le Samaritain de l’évangile, dans la logique de la gratuité.

Suis-je prêt à être comme lui et à devenir une femme, un homme qui « rend grâce » ? Tout simplement parce que tout ce que je suis, tout ce que je vis, tout ce que je ressens, tout ce que je fais et pense est DON de Dieu. Gratuitement, par amour.

Amen.

 

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