Abbé Louis-M. Passera et Andrea Wassmer, le 6 février 2005, à l’église St-Etienne, Belfaux (FR) Lectures bibliques : Isaïe 58, 7-10; 1 Corinthiens 2, 1-15; Matthieu 5, 13-16 – Année A |
1ère partie : abbé Louis-Marc Passera
« Vous êtes le sel de la terre, (…) vous êtes la lumière du monde » (Mt 5,13-14)
A ceux qui s’étaient rassemblés autour de lui sur la montagne, à nous qui sommes rassemblés autour de lui aujourd’hui – ici dans cette église où à travers les ondes de la radio – Jésus dit qui nous sommes.
Il venait de proclamer les béatitudes (Mt 5,3-11). Il nous avait dit : vous êtes pauvre, vous pleurez, vous avez faim et soif de justice, c’est pour vous que je suis venu, pour que vous ayez la vie. Vous êtes malade ou en prison, vous êtes angoissés par le futur. C’est pour vous que je suis venu, pour que vous soyez heureux.
Il nous dit maintenant : Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde.
C’est d’abord un sentiment d’émerveillement qui nous envahit. Et c’est de manière très réaliste que nous pouvons chanter avec Marie notre Magnificat (cf. Lc 1,46-55).
Mais c’est aussi la conscience de notre responsabilité. Les invitations du livre d’Isaïe sont concrètes : « Partage ton pain (…) recueille chez toi le malheureux (…) couvre celui que tu verras sans vêtement (…) ne te dérobe pas à ton semblable (…) fais disparaître le joug, le geste de menace, la parole malfaisante (…) donne de bon cœur à celui qui a faim » (Is 58,7-10). Et Jésus de nous dire : je compte sur vous, vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde.
Comment ne pas nous sentir tout petits, comment ne pas éprouver le sentiment d’une certaine impuissance ?
Le témoignage de Paul nous rejoint et nous touche : « c’est dans la faiblesse et tout tremblant que je suis arrivé chez vous » (I Cor 2,3). Il dira dans la deuxième lettre aux Corinthiens : « C’est quand je suis faible que je suis fort » (II Cor 12,10)
Il nous connaît le Seigneur qui nous fait confiance. Il est avec nous en toute circonstance celui qui nous envoie. Nous savons que nous aussi, nous pouvons lui faire confiance.
En ce dimanche de l’apostolat des laïcs nous ne pouvons que nous émerveiller devant tant d’hommes et de femmes qui se font l’écho de la parole de Dieu et qui rendent visible à nos yeux, celui qui a le souci du bonheur de chacun.
Ici, en Suisse Romande, le témoignage des laïcs est particulièrement riche. Il nous est précieux pour avancer ensemble dans la foi.
C’est avec beaucoup de bonheur que j’invite Andréa Wassmer à nous offrir son témoignage.
2ème partie : Andréa Wassmer, Présidente CRAL (Communauté Romande de l’Apostolat des Laïcs)
Chères paroissiennes, chers paroissiens,
chers auditeurs, qui êtes chez vous, ou peut-être au travail, vous qui êtes sur les routes, je vous salue tous… et je vous salue particulièrement, vous qui êtes malades, hospitalisés et qui ne pouvez vous déplacer.
Je suis heureuse que la parole me soit donnée aujourd’hui en ce dimanche des laïcs pour témoigner de la joie que je vis… pour me faire l’écho de l’engagement d’ hommes et de femmes, de jeunes et moins jeunes que je côtoie dans les mouvements d’apostolat des laïcs de Suisse romande… En effet comme présidente de la CRAL, la Communauté Romande de l’Apostolat des Laïcs, j’ai la chance de rencontrer beaucoup de monde et de m’émerveiller de tant de chemins de foi… Ces mouvements d’Église dans la diversité de leurs charismes sont en effet autant de lieux où l’on peut vivre sa foi et en témoigner ouvertement …
Si, dans toute la Suisse Romande, on consacre ce dimanche aux laïcs, c’est pour que nous puissions célébrer ensemble et mieux reconnaître les engagements des chrétiens qui vivent leur foi dans la vie de tous les jours, dans les mouvements d’apostolat, dans la catéchèse et partout en Église.
C’est un fait, la plupart des chrétiens, nous sommes des laïcs.
Comme baptisés, nous sommes tous appelés à de multiples formes d’engagements et les vocations sont très diverses…
Une de ces formes d’engagement, ce sont les mouvements d’apostolat des laïcs; vous en connaissez certainement: il y en a beaucoup… Et 23 de ces mouvements sont membres de la communauté romande que je représente. Il y a par exemple le MADEP, mouvement d’apostolat de l’enfance et des pré-adolescents, la Vie Montante, Pax Christi, les Équipes Notre-Dame… Les mouvements sont des lieux où, comme chrétiens, nous exprimons librement notre foi, où nous pouvons aussi nous ressourcer, affermir nos convictions, nous former, nous interpeller… Les mouvements de laïcs nous permettent, chacun selon sa vocation, de grandir et de toujours mieux devenir ce que nous sommes.
Jésus nous le dit: « vous êtes le sel de la terre »… Il ne nous dit pas « devenez le sel ou soyez le sel, soyez la lumière »… En effet, nous sommes déjà sel et lumière. Mais -vous le savez- pour manifester sa saveur, le sel doit être utilisé à bonne fin. Dans l’armoire de la cuisine… il ne sert à rien… c’est pour apprêter un plat que le sel est utile…
La lumière, elle, est là non pour être cachée sous une table, mais pour éclairer, pour éclairer le lieu où nous vivons…
Nous, les laïcs, au jour de notre baptême, nous avons reçu un mandat, le mandat de témoigner de Jésus Christ présent au milieu de tous, présent en chacun de nous…. Répondre à ce mandat, cela implique de la créativité et de la disponibilité, car dans le quotidien de nos vies il n’est pas toujours nécessaire, ni même parfois possible, de dire explicitement ce que l’on est… Que l’on soit baptisé ou non, que l’on soit chrétien ou non…. cela ne se voit pas au premier coup d’œil… Nous, les baptisés, nous sommes en apparence comme tout le monde: nous habitons les mêmes immeubles, nous avons les mêmes professions, nous sommes enfants, jeunes, moins jeunes, parents, grands-parents… Dans le quotidien de la vie, rien ne nous distingue des autres.
De nos jours cela nous paraît évident… mais, tout compte fait, ce n’est pas si évident que ça. Je me souviens de ce qu’on nous disait au catéchisme, il y a quelques années… Alors tout paraissait justement réglé: il y avait d’un côté la certitude du salut pour les baptisés, les bons…et de l’autre la condamnation , la condamnation pour ceux qui ne suivaient pas le chemin des justes… Certaines choses entendues ont inscrit en nous des peurs et des culpabilités difficiles à dépasser. J’étais l’autre jour avec des amis un peu plus âgés que moi, qui se souvenaient du temps où on affirmait qu’il fallait éviter de côtoyer les divorcés de peur d’être en quelque sorte contaminé par le mal…
Mais je ne jette surtout pas la pierre à ceux qui m’ont donné la connaissance des fondements de ma foi… car leur foi était sincère et elle correspondait aux modèles de société de ce temps-là… je constate simplement avec joie que du chemin a été parcouru depuis…
De nos jours, la situation n’est plus la même… C’est un fait: il y a moins de gens à la messe du dimanche, mais j’ai la chance de rencontrer quantité de femmes et d’hommes qui sont dans un réel chemin de foi. Il y a quelques jours, je participais à une rencontre des responsables du mouvement franciscain. Et l’une des participantes nous expliquait que, dans son groupe, des hommes et des femmes viennent y partager leurs situations de vie dramatiques, de ces drames de la vie, si durs à vivre, si durs à assumer, si durs à entendre… Bien sûr, ces personnes dans la souffrance sont souvent prises en charge ailleurs par des professionnels, mais cela ne suffit pas et elles expriment leur besoin de venir régulièrement dans le groupe car là, dans un groupe qui partage et prie, elles trouvent un véritable soutien.
Chaque chemin ne peut être que personnel, mais nous avons besoin des autres, nous avons besoin de lieux, de foyers, de familles, de groupes, de mouvements où nous exprimer librement, où l’on peut confier nos doutes et nos espoirs…, des lieux où recevoir autre chose, quelque chose qui a du goût, quelque chose de lumineux… C’est là sans doute que se vivent des conversions … Nous avons besoin de nous rencontrer pour approfondir, pour donner vie, pour donner couleur, pour donner goût à notre foi…
Dans notre monde où la détresse des laissés-pour-compte, où le mal être, le mal d’être et le désespoir sont criants, il y a des personnes – vous en connaissez probablement – qui tiennent le coup, des personnes qui réchauffent les coeurs, il y en a qui nous soutiennent, qui partagent, qui rayonnent, qui se donnent, qui se donnent à nous…
C’est au nom de leur foi que, dans les mouvements de laïcs, dans les paroisses, et dans la vie quotidienne, des chrétiens se livrent à la vie, forts de Jésus Christ.
Ils sont la réalisation, la réalité de la parole de Jésus qui nous aide à comprendre et à être qui nous sommes:
Chers amis, chers auditeurs :
«Vous êtes le sel de la terre, vous êtes la lumière du monde ! »