Messe du 33e dimanche ordinaire

 

 

Abbé Bernard de Chastonay, à la cathédrale de Sion, VS, le 16 novembre 2003.

Lectures bibliques : Daniel 12, 1-3; Hébreux 10, 11-18; Marc 13, 24-32

Chers frères et sœurs en Christ, chers malades, chers auditeurs,

En ce milieu du mois de novembre, à l’autre bout de la planète, se déroule une compétition qui passionne les foules et rassemble des dizaines de milliers de spectateurs dans divers stades.

Ici même, en Europe, en France, en Angleterre, de très nombreuses personnes se retrouvent devant leur petit écran pour suivre les matchs en direct. Je veux parler, bien sûr, de la Coupe du monde de rugby.

A mes yeux : un sport étrange ! Mélange d’apparente brutalité et de finesse tactique, de force et de rapidité, de mêlées, de poussées et de courses effrénées,… et dont les règles sont parfois si subtiles qu’après bien des efforts, je n’en ai toujours pas percé les secrets.

Oui, mais… quel rapport, me direz-vous, entre le rugby et les textes que nous venons de lire, en particulier dans le livre de Daniel et l’évangile selon saint Marc ? Aucun, sauf peut-être celui-ci :
– ce n’est pas parce que les règles d’une compétition de rugby sont difficiles à saisir pour le non-initié qu’il ne faut jamais s’aventurer à regarder une rencontre,
– de même, ce n’est pas parce que les lectures du jour appartiennent au genre apocalyptique, parfois hermétique pour le profane, qu’il faut automatiquement renoncer à en saisir le sens.

Pour comprendre le message que Jésus nous adresse en ce dimanche de la Bible, il faut nous laisser instruire. La comparaison du figuier, évoquée dans l’évangile, nous incite à cela. « Dès que ses branches deviennent tendres, et que sortent les feuilles, vous savez que l’été est proche. »

Cette brève image parabolique du figuier nous invite à une attitude qui conduit à une certitude.

L’attitude, c’est – dans le fond – celle du paysan, du cultivateur, qui observe attentivement la terre qu’il travaille pour y déceler les signes qu’un jour à venir, à la bonne saison, il en recueillera les fruits.

Observer le figuier, toucher ses branches tendres, observer les feuilles sortir, et l’on sait que l’été est proche.
La certitude, c’est donc que la belle saison arrivera.

Ainsi Jésus, dans ses propos, ne nous invite pas à tomber dans un catastrophisme tout empreint de pessimisme et de désespérance, mais au contraire à vivre dans une vigilante espérance en la venue du Fils de l’homme et dans la certitude de son triomphe final. Un triomphe que nous rappellerons d’ailleurs dimanche prochain, en la fête du Christ-Roi.

C’est aussi un vent de triomphe qui traverse les lectures d’aujourd’hui. Réécoutons le prophète Daniel : « Beaucoup de gens qui dormaient dans la poussière de la terre s’éveilleront… Ceux qui sont des maîtres de justice pour la multitude resplendiront comme les étoiles dans les siècles des siècles. »

Le peuple de l’Alliance, au cours de sa longue histoire, a souvent dû lutter pour sa survie et pour la défense de sa foi en un Dieu unique. Pour qu’il garde courage, les prophètes – dont Daniel – ont eu pour tâche première d’annoncer l’issue positive de ce combat, la victoire définitive du Dieu tout-puissant sur les forces du mal.

S’ils décrivent ce combat à l’aide d’images relatant des bouleversements cosmiques, c’est pour mieux mettre en évidence le triomphe final du Dieu d’amour.

Dans ses propos, Jésus s’inscrit dans la même ligne, mais il annonce, lui, après le temps des catastrophes, la venue du Fils de l’homme.

Il nous invite à une vigilante espérance. Vigilante : car la vie reste un combat, lutte contre la maladie, contre les injustices de toute sorte, bataille contre les fauteurs de guerre en tous genres.

Espérance : car le Fils de l’homme enverra ses anges rassembler des quatre coins de l’univers ses élus pour leur faire partager sa gloire.

Il nous faut entendre les paroles du Christ annonçant des bouleversements cosmiques avec la mentalité d’un juif de son époque. Car, ne l’oublions pas, en-dehors d’Israël, chez les autres peuples de l’Antiquité païenne, le soleil, la lune et les astres représentaient les divinités principales de leur panthéon.

Annoncer, comme le fait Jésus, que le soleil s’obscurcira, la lune perdra de son éclat et que tomberont les astres, c’était simplement affirmer que le Dieu unique et créateur s’imposerait à l’idolâtrie païenne.

Ce que Jésus nous rappelle, c’est qu’un monde ancien doit s’en aller pour laisser place à un monde nouveau ; le monde du péché disparaîtra pour que s’établisse celui de l’Amour miséricordieux. Le rassemblement de tous les élus que Jésus promet sera la réalisation universelle d’une promesse particulière faite par Yaweh à son peuple Israël.

 

Vigilante espérance :
– vigilante, car la lutte contre le péché n’est pas encore terminée,
– mais : espérance, car sur la croix, le Fils de l’homme a vaincu le monde.

Vivre au quotidien cette vigilante espérance, voilà ce qu’a réalisé dans sa vie une petite sœur du Sacré-Cœur, en plein cœur d’un pays traumatisé par de nombreux actes de barbarie sanguinaire.

Tuée en Algérie le 10 novembre 1995, on retrouva sur son corps cette prière, qui nous servira, je l’espère, de compagne de route pour toute la semaine à venir :

Vis le jour d’aujourd’hui,
Dieu te le donne, il est à toi, vis-le en Lui.
Le jour de demain est à Dieu.
Il ne t’appartient pas.
Ne porte pas sur demain le souci d’aujourd’hui,
demain est à Dieu, remets-le Lui.
Le moment présent est une frêle passerelle :
si tu le charges de regrets d’hier
et de l’inquiétude de demain,
la passerelle cède et tu perds pied.

Le passé ? Dieu le pardonne.

L’avenir ? Dieu le donne.

Vis le jour d’aujourd’hui
en communion avec Lui.

AMEN.

 

 

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