Messe du 33e dimanche ordinaire

 

Abbé Olivier Humbert, à l’église Saint-Paul, Fribourg, le 17 novembre 2002.

Lectures bibliques : Proverbes 31, 10-31; 1 Thessaloniciens 5, 1-6; Matthieu 25, 14-30

Chers enfants, chers paroissiens, chers auditeurs de la Radio Suisse Romande,

J’ai envie de vous proposer aujourd’hui une version familiale de la parabole des talents. Imaginons un père de famille, un papa qui a trois beaux enfants. Il les connaît bien, il sait ce que chacun est capable de faire, et veut leur faire à tous les trois un cadeau qui les aide à grandir.

L’aîné, Ronaldo, est déjà grand. Il a l’esprit vif, il est habile. Le papa décide de lui offrir un splendide jeu de construction. Fou de joie, l’enfant l’embrasse et commence tout de suite à construire une grande et belle maison, avec beaucoup de chambres, pendant que son papa part travailler. Lorsque son père rentre du travail, Ronaldo, tout heureux court vers lui et lui dit : « Regarde la belle maison que j’ai faite avec le jeu que tu m’as donné ! » Papa est tout ému et lui dit : « Maintenant, tu pourras m’aider pour faire les petits travaux de la maison. Tu es déjà un petit homme. »

Sa cadette, Alice, est plus douce, plus introvertie. Elle est très douée pour le dessin. Le papa se dit : « Je vais lui offrir une belle boîte de crayons de couleurs et une palette avec des tubes de peinture de toutes les couleurs : rouge, jaune, bleu, vert, gris, noir et blanc. La fillette, ravie, part dans sa chambre, dessine un magnifique paysage avec des arbres, des lacs et toute la famille qui se promène. Elle le met dans un cadre, l’offre à sa maman et dit au papa : « Regarde le beau dessin que j’ai fait pour maman ! » Le papa, émerveillé et tout joyeux lui dit: « Comme c’est beau ! Tu vas être l’artiste de la maison, et tu pourras décorer la maison avec plein de belles choses. »

Le 3ème enfant, Donatien, est le plus jeune. C’est le petit dernier et son papa l’aime beaucoup, autant que les deux autres. Comme il est encore petit et qu’il vient juste d’apprendre à lire, son papa, après avoir réfléchi se dit : « J’ai trouvé ce que je vais lui offrir : un grand livre plein de jolies images. Comme ça, il pourra me raconter ce qu’il a découvert du livre. Il va apprendre à aimer la lecture. » Mais, Donatien est un peu un enfant gâté. En recevant le livre, il n’est pas content. « Papa veut me forcer à lire. Il ne m’offre pas ce livre pour me faire plaisir, mais pour m’embêter. Je ne le lirai pas. » Sans même l’ouvrir, il met le livre dans un vieux carton poussiéreux, va au fond de son grenier, et se met à bouder.

Le papa, en rentrant, va trouver le petit et il est tout surpris de le voir faire la tête, refuser de l’embrasser et lui dire : « Le livre que tu m’as donné ne me plaît pas. Il est à toi, je te le rends ! » Papa est très déçu. Les larmes lui montent aux yeux de voir que son cadeau a été méprisé. Qui aime bien châtie bien ! Très en colère, il dit à son enfant : « Je t’avais offert ce livre pour te donner la joie de découvrir de nouvelles choses et de grandir. Je vais donner le livre à ton grand frère. Lui, il le lira ! Et toi, puisque tu veux faire la mauvaise tête, reste dans ton petit coin. Donatien, tu dois apprendre à donner ! » L’enfant se met à pleurer, mais déjà il commence à réfléchir. Il est encore grincheux, mais déjà il se rend compte qu’il a été méchant et ingrat. Pour cela, il a fallu que son père se fâche et le punisse, en lui retirant son livre, et en le laissant tout seul dans le noir.

Cette histoire, c’est un peu celle de Dieu notre Père, avec nous, ses enfants. Nous pouvons être comme Ronaldo ou comme Alice, recevoir notre vie, nos talents comme un beau cadeau offert par un Père plein de bonté et faire de notre mieux pour réaliser quelque chose de magnifique avec. Nous pouvons aussi être comme Donatien, jouer les enfants gâtés qui refusent les dons que Dieu nous fait. C’est ce que nous dit Jésus dans la parabole des talents. C’est à nous de choisir : soit de nous réjouir du don offert et le faire fructifier au maximum, soit de faire la fine bouche et enterrer notre talent. Multiplier le don ou le rendre tel quel, s’ouvrir au don ou le rejeter, choisir la vie ou choisir la mort. Dieu met en nous toute son espérance, comme le papa avec ses enfants. Il nous connaît, sait ce que nous pouvons déjà faire et ce que nous ne pouvons pas encore faire. A chacun de nous, il donne selon ce qu’il peut recevoir, mais c’est de toute façon un immense cadeau. Un seul talent, c’est le salaire d’un ouvrier pendant 17 ans, pas loin d’un million de francs suisses.

Le choix nous appartient : soit d’honorer la confiance que le Maître place en nous, soit de mépriser son espérance, par peur, par paresse, par aigreur. Le troisième serviteur de la parabole juge le maître, préfère l’accuser que de se mettre au travail. Que peut faire le maître d’un tel serviteur ? Le mettre dehors, c’est encore lui rendre service, l’aimer, lui donner une nouvelle chance d’arrêter de maugréer et d’accepter enfin de servir d’un cœur joyeux.

La joie, c’est bien le mot-clé de cette parabole. Les deux premiers serviteurs entendent cette formidable invitation : « Entre dans la joie de ton Maître ». Viens partager la liberté, la joie de Dieu.  » Dieu nous laisse libres : c’est notre chance ! La chance d’entrer dans la vraie joie, de choisir la joie de vivre et d’aimer.

Dans notre paroisse où des personnes de plus de 70 nationalités se côtoient, nous avons cette chance de vivre la diversité des talents, des dons. Sachons nous accueillir mutuellement dans cette diversité. Apprenons à voir dans celui qui est différent, non pas d’abord une source de danger et de difficulté, mais surtout une occasion de partager la joie, celle de notre seul Maître à tous, le Christ-Jésus.

Amen.

 

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