Messe du 32ème dimanche ordinaire

 


Abbé Michel Suchet, monastère des Dominicaines, Estavayer-le-Lac, le 11 novembre 2007
Lectures bibliques : 2 Martyrs d’Israël 7, 2-9, 14; 2 Thessaloniciens 2, 16 – 3, 5; Luc 20, 27-38 – Année C

En ce mois où les jours décroissent de soixante douze minutes,
en ces jours d’été de la Saint Martin et en ces heures de rencontre entre les grandes religions du monde,
parmi nous, qui ?
oui qui, ne se laissera pas quelque part marquer par la brièveté de la vie ? par la longueur des veilles et des nuits, surtout quand on avance en âge ou qu’on est cloué à un lit !
Des célébrations nous invitent pourtant à embrasser de plus vastes horizons. Les chrysanthèmes aux couleurs pascales sont signes de Vie et de Résurrection au milieu d’une nature qui semble s’endormir… pour renaître.

Devant ce panorama, nous autres humains, nous nous laissons aussi interroger par la vie quotidienne,  d’une part : notre survie ! l’avenir de la planète et de ses habitants, et d’autre part : porteurs de ce trésor qu’est la Parole de Dieu, nous nous laissons interpeller… comme ces Sadducéens qui viennent à Jésus. Ces religieux dissidents s’affrontent à Jésus sur des questions de fond : Que deviendrons-nous ? Où allons-nous ? Qui assura notre descendance ? Que ferons-nous ? et nos héritiers ? Comment serons-nous ?

Jésus lève le voile sur le mystère de l’Au-delà : la réponse du Maître est claire : « Nous serons heureux, ceux qui sont morts ne peuvent plus mourir, ils sont fils de Dieu. » N’est-ce pas ? Il en va d’une renaissance spirituelle liée à notre condition d’enfants du même Père, vécue désormais à 100% pour toujours, une vie transfigurés, une vie glorieuse qui dépasse en qualité ce que nous trouvons le mieux sur terre : « L’amour humain ».

Il en va d’une vie d’amour total en Dieu-Trinité, sans limite aucune, pour toujours, une commune UNION. Au sens où la petite Thérèse de l’Enfant Jésus dit : « le ciel c’est l’Amour. Je passerai mon ciel à faire le bien sur terre ».
Si Jésus lève le voile sur l’au-delà, ne faut-il pas se rappeler que DEMAIN COMMENCE AUJOURD’HUI ?
La vie des ressuscités commence ici-bas.

Le livre des Martyrs d’Israël vient juste à propos, nous rappeler que la fidélité à la Loi, c’est-à-dire à la Parole de Dieu est source de Vie, de relèvement. Par sa réponse, Jésus invite son auditoire à regarder et à marcher dès maintenant vers cette réalité d’En Haut. Réalité à la fois mystérieuse et merveilleuse… offerte à chacun d’entre nous.

Le chemin, c’est LUI, Jésus-Christ et son Evangile, car Il est venu nous faire connaître, non pas le Dieu des morts mais des vivants. Son ciel est un Royaume de Vie peuplé de ceux qui sont parvenus à la vraie Vie, qui sont aimés de Dieu comme Abraham, Isaac, Jacob, les prophètes morts depuis des siècles.

Le chemin qu’il faut emprunter désormais, c’est Lui qui fait renaître, j’ose dire qui « divinise » notre existence au sein d’une famille : l’Eglise. Selon l’expression de Bossuet : « Christ continué, répandu et communiqué ».
Et ce chemin, parfois un sentier escarpé et étroit, prend la figure de balises, de points de repères… un Ecrit, une Parole inspirée, bien plus comme dit saint Paul, « un trésor » qui nous est confié, en nos mains, contenu dans des vases d’argile.
Et ces balises s’adressent aux humains de bonne volonté de toutes les nations, en vue de construire, de bâtir de cette multitude, UN SEUL PEUPLE, ardent à faire le bien. Toutes les classes de la population sont invitées à recevoir ce trésor… mais il existe sur cette planète, certaines qui connaissent de profondes mutations…

En ce dimanche dit « des peuples », le pape Benoît XVI nous demande de réfléchir à la condition de la famille migrante en ces termes : « Peu de temps après la naissance de Jésus, Joseph fut contraint de partir de nuit en Egypte. Dans le drame de la famille de Nazareth, obligée de se réfugier, nous entrevoyons des réfugiés, des exilés, des dispersés, des déplacés internes ou des persécutés… »

Oui, la mobilité… phénomène de notre temps, mais ces déracinements – finalement au quotidien – véritables pâques, ne serait-ce que pour nos frères et amis hospitalisés, changement de traitements, de services ! et j’en passe…

Alors au cœur de cet état de fait, de notre condition même de migrants à toutes et à tous, retentit la profession de foi du vieillard Syméon : « Laisse ton serviteur s’en aller selon ta Parole car mes yeux ont vu ton salut, salut que tu prépares à la face des peuples, lumière pour éclairer les nations. » Ces paroles de l’homme avancé en âge, rejaillissent sur l’Eglise, nation sainte, selon l’expression de saint Pierre, le peuple nouveau scellé par le sang du Christ. Elles retentissent encore sur tous les peuples, de toutes races, langues et nations pour former « UN SEUL PEUPLE ».

Ces paroles de feu font de nous, migrants, ici-bas, des pèlerins de lumière, car en nos mains nous possédons tout un patriotisme spirituel : les 150 psaumes, les arts, la musique qui sont comme un viatique pour parcourir le chemin balisé qui conduit au sommet de l’Amour… Dans l’audace de l’adoration, la Résurrection, c’est notre Seigneur en personne (saint Irénée). Ecoutez plutôt :

Peuple de toutes les nations,
Elève à Dieu tes chants de fêtes
O foule immense de témoins, de rois,
De prophètes et de prêtres.
Peuple de toutes les nations,
Elève à Dieu tes chants de fête.

Peuple choisi, tu es béni
Demeure en Dieu, le Père
Peuple de frères dans le Fils
Marche éclairé par sa Lumière.

Peuple nourri au même Corps
Viens partager le Pain unique
Force des doux, douceurs des forts
Il est le Pain des pacifiques.

Encore aujourd’hui, cette Parole qui tient lieu de balise, d’indicateur de direction, pour les jours lumineux comme pour les étapes sombres de nos nuits intérieures… de nos essoufflements, nous aide à croire, à vaincre et à convaincre.
Croire qu’en Eglise, nous ne sommes pas étrangers les uns aux autres, reconnaître que nous sommes membres d’un peuple qui a Dieu pour Père et la fraternité pour loi, pas une foule, mais un peuple affamé et assoiffé.
Vaincre : les peurs, les déracinements.
Et enfin, convaincre que Christ est la Lumière du monde, et qui le suit aura la Lumière de la Vie. Car si tu veux être une star dans le ciel, sois d’abord une petite étoile ici-bas.

Croire, vaincre et convaincre :
Trois appels… comme trois réponses pour ton « aujourd’hui ».
Trois réponses qui nous mettent en marche vers la grande famille humaine de la planète et qui nous ouvrent le ciel.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *