Messe de la Pentecôte

 

Abbé Jean-Marie Pasquier, église Saint-Maurice, Pully, le 27 mai 2007
Lectures bibliques :
Actes 2, 1-11; Romains 8, 8-17; Jean 14, 15-26 – Année C

Pentecôte à Jérusalem, en l’année 30, à 9 h. du matin : que s’est-il passé ? Pentecôte 2007 … chez nous, aujourd’hui : que pourrait-il bien se passer ? qu’est-ce que cela pourrait changer ? Mais revenons d’abord aux textes que nous venons de lire. Quel formidable contraste entre l’événement rapporté par saint Luc dans les Actes des Apôtres et l’expérience spirituelle évoquée par l’évangile !

D’un côté, un véritable spectacle « son et lumière » : un grand bruit, un violent coup de vent, le feu … Et voici que les disciples, que l’on croit pleins de vin doux, sortent de la maison où la peur les avait enfermés, et parlent sans crainte. Devant qui ? Une sorte d’assemblée de toutes les nations connues à l’époque. Miracle : tout le monde comprend. Les apôtres ne sont pas devenus polyglottes, mais chacun les comprend dans sa propre langue. Car un même Interprète leur est donné : l’Esprit de vérité. Babel – la confusion des langues – est renversé. Le nouveau peuple de Dieu est né, universel. L’Eglise du Christ est en train de venir au monde …

Mais pensez-vous que cette explosion soudaine eut été possible sans une secrète préparation ? Il n’y a pas d’éclosion sans germination, pas de naissance sans fécondation intime. L’effusion éclatante de Pentecôte avait été précédée par l’infusion cachée de l’Esprit dans le cœur des disciples, dès le soir de Pâques, et même plus tôt … Une venue sans bruit, silencieuse. L’Esprit de Dieu vient sans effraction, dans le respect le plus total de la liberté, pour être accueilli dans l’amour. Jésus ne dit pas autre chose : « Si vous m’aimez … vous resterez fidèles .. .je prierai le Père … et il vous donnera un Défenseur qui sera toujours avec vous. l’Esprit de vérité. » Rien d’automatique dans cette venue de l’Esprit : il y faut notre amour et notre fidélité, il y faut la prière de Jésus, et le don du Père … Et comme si Jésus craignait de n’être pas bien compris, il insiste : « Si quelqu’un m’aime, mon Père l’aimera, nous viendrons chez lui … Et il vous enverra l’Esprit Saint en mon nom ». Est-ce assez clair ?

La Pentecôte est bien un mystère à double face : le dehors et le dedans. Un événement intérieur et extérieur : il fallait que l’expérience intime de l’Esprit éclate au grand jour sur la place publique, en plein monde.

Comment vivons-nous aujourd’hui cette Pentecôte à la fois intime et missionnaire ? Il ne manque pas de grands rassemblements de la foi réunissant des chrétiens de tous pays et de toutes langues. Aujourd’hui même des pèlerins de Suisse romande rentrent de Lourdes où ils ont prié avec des chrétiens du monde entier. Cet été, des centaines de milliers de jeunes se rencontreront à Sydney pour les JMJ, et plus près de nous, entre Noël et Nouvel-An, des dizaines de milliers de jeunes européens  déferleront à Genève et sur tout le bassin lémanique pour le grand « pèlerinage de la confiance » organisé par Taizé ! Une vraie Pentecôte œcuménique.

Pourtant ces événements exceptionnels ne peuvent pas nous dissimuler une réalité moins réjouissante : l’essoufflement missionnaire de nos Eglises de vieille chrétienté, des assemblées vieillissantes et clairsemées, l’absence des jeunes dans nos églises, la crise des vocations … Une situation qui ne doit pas nous décourager mais nous interroger, à la lumière même de la Parole entendue aujourd’hui. Comment espérer une nouvelle Pentecôte extérieure sans le renouvellement de la Pentecôte intérieure ? Voilà la vraie question : comment témoigner au dehors de l’amour de Dieu si nous n’en faisons pas l’expérience au-dedans ? Peut-il y avoir une mission s’il n’y pas une intense vie de communion ? C’est ce qu’ont vécu les premiers chrétiens qui furent aussi les premiers témoins et les premiers apôtres : par rayonnement de ce qu’ils vivaient au-dedans d’eux-mêmes..

Cela vaut pour toute l’Eglise, pour chacune de nos communautés, grandes ou petites. On dit souvent aux jeunes époux : soyez un foyer ouvert, rayonnant, un signe vivant de l’amour, etc. … Mais cela suppose qu’à l’intérieur du foyer un feu brûle et réchauffe. Car « seul celui qui brûle peut transmettre le feu ».  Qui allumera ce feu et l’entretiendra, si ce n’est l’Esprit saint lui-même, l’amour de Dieu qui brûlait le cœur des apôtres, et qui veut venir aujourd’hui sur nous Il ne dépend pas de nous de changer demain la face de la terre, mais il dépend de nous de nous ouvrir, sans attendre, au Souffle de Dieu, au feu de l’Esprit … Oui, viens Esprit Saint, allume en nous le feu de ton Amour. Amen.

 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *